Un concert merveil’Yeu…Bénabar @ Ile d’Yeu, 8 Août 2015.

L’itinéraire est formel

On aurait dû depuis longtemps

Quitter la nationale

Qu’est-ce qu’on fout à Orléans ?

Hasard de playlist. Alors que le GPS d’Helene nous envoyait à l’opposé de la côte où nous étions supposées prendre le bâteau pour l’île d’Yeu, Bruno est venu s’inviter et nous donner son point de vue sur la question des paumés des routes. Stupéfaites, Jess et moi nous sommes regardées, avant d’éclater de rire en se laissant bercer par les paroles qu’Helene découvrait pour la toute première fois, et que je rédécouvrais sous une lumière nouvelle.

Deux heures auparavant, après une courte nuit, Jess et moi nous étions réveillées à Nantes, avec ce sourire indestructible qui ne sait s’installer dès le réveil que les jours de concerts. Et avec ceux de Bruno, ils sont un rien plus éclatants que d’habitude. J’avais envie de sauter partout, et surtout, de faire savoir à la terre entière comme j’étais ravie et impatiente, une fois encore. Qu’importait que la journée soit longue, et commencée bien trop tôt pour se finir si tard, je me sentais pleine de quelque chose d’assez fort pour noyer complètement mon envie de dormir encore.

Aujourd’hui, le binôme devient trinôme, enrichi pour l’occasion de Helene que nous embarquons avec nous dans cette histoire un peu folle mais si belle.

Et à neuf heures vingt, il faut bien se rendre à l’évidence que le GPS, il a décidé de nous planter. A force de tourner à gauche, on va finir par louper la mer pour de bon…Alors que la conductrice s’étonne du caractère intrépide de son appareil en ce matin aux horaires relativement serrés, Bruno s’amuse du haut de sa playlist à venir donner des couleurs à la route. Des couleurs, et de l’ironie.

Alors qu’on commence finalement à voir les premiers panneaux pour St Gilles Croix De Vie, je peux souffler. On ne va pas se retrouver à Orléans, nous.

Arrivés au port de départ des navettes, je commence à faire vachement moins ma maline. Est-ce que j’avais précisé que je ne suis pas la plus à l’aise lors des traversées en mer ? Eh ben maintenant c’est fait. Mal de mer, mal de l’air, je déteste ne pas avoir les deux paluches solidement ancrées sur ce bon vieux plancher des vaches.

Vous la voyez venir, l’idée à la con ?

Aller chercher le petit chanteur français sur une île.

Avec le mal de mer.

Je vous rassure, des fois, je me collerais des claques aussi.

Enfin, le fait est que je n’ai plus le choix, je suis assise à l’arrière de la navette, le nez en plein sur la flotte, le teint tirant déjà sur le blanc cassé façon glace à la noix de coco fondue, absolument pas à l’aise, maudissant par avance la raison pour laquelle, dernièrement, mes voyages, ils partent un peu en cacahuète.

Le navire part à toute berzingue. Ca tangue. Ca tangue beaucoup. Je murmure intérieurement et pour qui veut l’entendre que je déteste Bénabar, ça y est, c’est officiel, je n’en peux plus, je ne l’ai jamais aimé, et de toutes façons, je ne recommencerais pour rien au monde et surtout, surtout, pour personne. Cette saloperie va vite, elle fait des vagues dignes d’un concours de surf à Biarritz, et plus ça va, moins l’horizon est net et plus je sens le contenu de mon petit déjeuner avoir des envies d’évasion. Pour ne rien gâcher, la voisine d’en face, elle, n’a rien pu faire pour retenir le sien. Elle est plus jaune qu’un canari un jour de fête. Dans mon for intérieur, j’espère juste ne pas lui ressembler. Et je négocie avec mon petit déj pour conserver le statu quo.

Youhou, la terre ! Youhou, le port de l’île d’Yeu ! Youhou, il fait une chaleur pas possible alors qu’à St Gilles, on en était à deux doigts de se prendre la flotte.

Youhou, le premier pied posé sur terre est rock and roll. Maintenant que je suis arrivée, ça tourne salement, j’ai l’impression que ma tête est trop légère et que la ligne d’horizon est lancée dans une salsa endiablée.

Généralement, c’est là que je lâche un « putain, Bruno, qu’est-ce que je ne ferai pas pour tes beaux yeux ». En espérant très fort qu’il ne soit pas, par un coup du destin un peu vicelard, planqué dans les environs. Z’êtes mignons, c’est petit, l’île d’Yeu, et un accident est vite arrivé. Et entre nous, avec mon teint de papier mâché et ma mine desespérée, on aurait pu carrément se marrer. Enfin, lui, il aurait pu se marrer.

Après vingt minutes de tentative de reconnexion à la terre ferme, enfin, je commence à lever le nez et à regarder le port. Dites-moi, ma petite dame, c’est plutôt pas vilain par chez vous ! C’est même carrément beau, en fait. Un vrai paysage de carte postale. Devant nous s’alignent pêle-mêle les cafés, bars, brasseries, restaurants, boutiques à souvenir et les étals du marché. Des dizaines de vélos nous croisent, et de rares véhicules motorisés. Vraiment, on se croirait presque sur une petite île grecque, et le temps va avec. Soleil un peu plombant. Chaleur carrément pas prévue.

Notre premier reflexe est de trouver la zone où le festival aura lieu. Petit détour par l’office du tourisme, où une petite dame bien urbaine nous indique le chemin. Toujours tout droit au travers de ruelles bordées de maisons de toutes les couleurs, de cyclistes pressés, et de pas un putain de poil d’ombre. Mon allergie au soleil s’éclate. Moi, moins. Dans moins d’une heure, je vais ressembler à une framboise, en moins gourmand.

La petite dame n’avait pas menti, après dix minutes de marche sous le soleil, nous voilà devant la citadelle. Mention spéciale à la seule bénévole de l’association Viens Dans Mon Ile qui sera carrément désagréable avec nous. Tous les autres ont étés absolument géniaux. Mais niveau première impression, je n’étais pas forcément super enjouée. Ma première heure sur l’île n’était pas vraiment idéale, et ma mutation en baie sauvage lucitée commençait à devenir carrément problématique. Tel Baloo dans le livre de la jungle, je me serais bien grattée sur un tronc d’arbre tant ma poussée d’urticaire allergique me démangeait. Ou piquer une tête dans l’Atlantique. Au choix.

Une fois ce repérage essentiel terminé, il est temps d’aller grignoter un morceau sur le port.

C’est là que les choses ont commencé à partir un peu dans tous les sens. A trente centimètres près, alors que nous venions tout juste de récupérer le port en venant d’une petite ruelle perpendiculaire, j’ai manqué de rentrer dans…Julien.

En fait, si je tournais la tête à droite comme à gauche, j’allais tomber sur un musicien de Bruno. Etrange. Très, très étrange. Et, une table en terrasse enfin trouvée, et deux salades et une galette commandées, ils sont en petits groupes, là, à entrer et sortir de mon champ de vision sans même avoir un début d’idée du bazar que cela fout dans ma pauvre tête. Et surtout, que d’un coup, les choses sont redevenues drôlement concrètes.

Si ils sont tous là…Ils ne sont sûrement pas seuls.

Quelque chose se réveille alors en moi, quelque chose de terriblement impatient, quelque chose de complètement dingue, quelque chose de profondément ancré, déjà. Quelque chose qui a tout juste fêté ses six mois d’existence. Quelque chose qui me tient à coeur plus que n’importe quoi, et qui m’a fait me sentir plus vivante que n’importe qui ne l’avait jamais fait.

Je sais pourquoi je suis sur cette île.

Je sais surtout pour qui.

Finalement, nous passons l’après-midi entre copines, dans la forêt qui jouxte la citadelle, à refaire partiellement le monde tout en trépignant sur place des évènements de la soirée. Mes yeux un peu fatigués s’illuminent à chaque fois que je jette, au loin, un oeil sur l’immense affiche de la tournée de mon faiseur de bonheur.

Entre temps, Jess a signé avec un Julien relativement joyeux un high five breton, initialement partie pour aller se chercher à boire. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils ont eu le chic de venir colorer la journée.

Toujours partiellement restée coincée dans ma saison 2 de Arrow, je fais remarquer aux filles chaque fois que je trouve quelque chose de vert. Elles ont décidé depuis longtemps que ma sévère obsession pour Oliver Queen se manifestait totalement dans ma furie à répérer les nuances émeraudes, et je trouve que signer cette journée des autres choses que j’aime d’amour ne rend mon existence actuelle que plus heureuse encore.

C’est fou ce que le temps peut passer vite quand on est entouré des bonnes personnes. Jess, Helene et moi ne manquons pas de conversation, rebondissant d’une fandom à une autre, d’un projet à un autre, d’un fou rire à un autre avec une facilité presque déconcertante. Les quatre heures de séjour dans la forêt passent à une vitesse hallucinante, et déjà, dix huit heures bien tassées sonnent, et il est temps d’aller rejoindre la toute, toute petite file d’attente à la citadelle. Et d’être accueillies très, très chaleureusement par tous les bénévoles, preuve ultime que le vilain petit canard du début de la journée ne pouvait, finalement, pas nuancer la beauté de l’expérience et la force de l’humanité tout autour.

A quelque chose comme 18h40, on nous laisse enfin pénétrer dans la cour de la citadelle. Et, sans avoir à forcer, nous voilà au premier rang, du côté gauche, et je peux déjà dire que dans quelques heures, Bruno sera plus près de nous qu’il ne l’a plus été depuis le Vauban.

Alors que j’empoigne cette barrière que je n’avais plus cotoyé depuis bien longtemps, je prends, une nouvelle fois, en pleine poire, l’espèce de force bizarre qui me lie à l’artiste.

Et ça me rend heureuse. Bêtement. Simplement. C’est comme mettre la main sur une source de magie pure à chaque fois. Un bonheur qui n’a de cesse de se réinventer, motivé par le talent du chanteur, et par son extraordinaire personnalité qui s’est amusée à se calquer par tant de points sur la mienne.

Six mois…Six mois et j’en suis déjà à ma cinquième date, perdue au fin fond de nulle part, les bras croisés sur une barrière froide que j’avais peut-être déjà fréquenté pour d’autres, le nez levé vers la scène, calculant mentalement les minutes qui me séparaient encore de mon chanteur d’amour. Six malheureux mois. Cette histoire avait commencé très fort, et elle se continuait dans la même logique.

Logique d’organisation parfaite, à peine arrivées, nous pouvons aller et venir vers les stands du fond de la cour, pour aller manger un morceau, se dégourdir les jambes, aller aux toilettes. Pas vraiment une habitude de mes concerts au premier rang !

Sur l’écran latéral du côté gauche, la programmation du festival défile, d’abord penchée sur Yannick Noah, puis sur Shaka Ponk, et enfin, soulevant mon coeur dans une joie toute spéciale teintée de souvenirs, images de la tournée que j’ai tant aimé à l’appui, sur le magicien de la soirée. Voir le nom de l’artiste en énorme a toujours quelque chose d’indescriptible et de fort.

Oui, c’est mon mien.

Oui, je crois que je pourrais le suivre au bout du monde.

Quitte à reprendre le bateau.

Il fallait que je fasse des efforts desespérés pour ne pas laisser échapper une larme à chaque rotation de la vidéo. Hasard de réalisation, un des plans sur son visage était d’une netteté et d’une honnêteté telles que j’ai été renvoyée aux quatre premières dates en un instant, un clin d’oeil.

J’ai fermé les yeux, levé mon visage vers la légère brise qui venait caresser la citadelle, je l’ai laissé souffler sur mon visage, saisissant la fragilité du moment, savourant sans un mot ma chance, et le caractère parfaitement heureux de ma position du moment.

Où j’étais, j’y étais bien.

Il n’y avait pas besoin de plus de mots pour décrire la situation.

J’étais juste bien.

 

A dix-neuf heures trente, la première des deux premières parties est montée sur scène, un trio de Nantais répondant au nom de Aymeric Maini, composé d’un très bon guitariste et chanteur, d’un génial bassiste, et du batteur le plus enthousiaste de l’histoire de la batterie, un phénomène haut en couleur qui ne pouvait rien retenir de sa joie d’être là. Communicatif. Leur pop-rock tirant sur le funk était gaie, colorée, et parfaitement agréable à écouter par un après midi ensoleillé. Je n’ai pas vu passer le temps, et un claquement de doigt plus tard, ils étaient déjà sortis de scène, et moi, je me rapprochais de Bénabar.

Pendant que les techniciens préparaient la seconde première partie, Cats On Trees, une pieuvre humaine rose et bleu est venue embêter le premier rang avec ses tentacules en peluche, gaie comme un pinson, plus sautillante que Bruno à Orléans, générant enthousiasme et rires. La poulpe est le symbole du festival, et de ce fait, un invité non-négligeable.

Cats On Trees sont arrivés un rien après. Quelques musiciens, des cordes surtout, en premier, avant que le duo n’envahisse la scène pour une de mes meilleures premières parties. Le genre du groupe est pop-rock sans renier un sérieux penchant pour les textes et mélodies mélancoliques et torturées, mais leur attitude live est diamétralement opposée. Ils nous ont tout fait faire, chanter à l’unisson, s’assoir pour se relever au signal du batteur, et la chanteuse adorable est venue se balader dans la foule comme si de rien n’était. Très, très, très bon moment. Sublime cover de Mad World. Divin dernier titre avant rappel, soufflés comme une déclaration d’amour. J’en reste un moment troublée, avant de me rendre compte que…

Qu’il ne reste plus de premières parties.

Qu’il est 22h.

Qu’au milieu du micmac de techniciens qui débarassent les instruments des toulousains, deux ou trois sont porteurs du t-shirt rose dont le dos annonce clairement la couleur.

Un certain Bénabar…

Inutile de mentir, les dernières trente minutes sont les plus longues. Un véritable enfer, alors que mes yeux sont solidement accrochés aux instruments qui grignotent tous un petit bout de scène, chacun à sa place, et que je situe mentalement les joyeux croisés plus tôt sur le port aux places qu’ils occupent. Je commence à être habituée. Mon coeur s’emballe déjà, alors même que les minutes, les secondes peinent à s’échapper, ou alors, pas assez vite, ni assez fort. Mes yeux brillent déjà, j’ai un frisson à chaque fois que j’envisage ce qui est sur le point d’arriver, comme si tout cela était bien trop beau pour moi, comme si je n’avais pas assez d’âme pour tout apprécier à sa juste valeur. Ni assez d’yeux pour tout dévorer de la bonne façon. Ou de coeur pour savoir prendre toutes les émotions.

Toute petite face à une immensité, je mesure les instants, je les savoure autant que je les maudis, je les subis autant qu’ils me sont délicieux. Je sais que je tremble, je ne peux rien y faire, c’est tellement plus fort que moi. Régulièrement, je ferme les yeux et en les rouvrant, tente la capture visuelle du moment, pour les ranger dans ma mémoire, pour m’en souvenir toujours, pour ne jamais oublier cet état presque hypnotique qui ne tient qu’à lui…Qui ne tient qu’à moi.

Comme pour me rendre plus fébrile encore, les lumières n’ont de cesse de s’éteindre pour mieux se rallumer, alors que j’épie chaque mouvement, chaque silhouette dans la pénombre derrière la scène, dans l’espoir d’apercevoir enfin celui qui, décidément, me fait faire tout et n’importe quoi-soyons honnêtes, surtout n’importe quoi.

Mais c’est bien, n’importe quoi. C’est gai, joyeux, coloré, drôle, émouvant, et surtout, ça rend super, super vivant.

Mon coeur sursaute une dernière fois alors que les lumières s’éteignent.

Cette fois, c’est la bonne, je le sais. Ces secondes sont plus que délicieuses, elles sont…Elles promettent quelque chose de génial et surtout, d’immédiat.

Le frisson qui menaçait l’ascension de ma colonne vertébrale est lâché, alors même que je vois les musiciens envahir la scène et l’intro qui précède Belle Journée commencer. Merde, cette sensation vaut décidément tous les trajets sur tous les bateaux, aussi laborieux fussent-ils.

Bien sûr que je le cherche du regard, je n’attends que lui. Et, sans que je n’ai eu trop à chercher, à un gros mètre de moi, je retrouve le plus joli sourire de la terre, qui, pour le coup, illumine déjà ma nuit tombante. Jess et moi, nous nous regardons, partageant la même émotion. Rien, personne ne peut prétendre être plus heureux sur terre que nous à ce moment-là.

Et nous voilà lancés sur Belle Journée, qui, à force d’ouvrir tous mes concerts, est devenu l’hymne des beaux jours. Non sans une certaine ironie, ni un certain humour, mais, quand on aime Bénabar, ce n’est pas vraiment surprenant…

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Il est beau. Si, c’est vrai. Je sais bien que j’ai les yeux de l’amour, et que toute mon objectivité est restée dans le plancher du Vauban, mais quand même. Et, soulageant la légère anxiété que j’avais vaguement traînée derrière moi depuis Compiègne, sa voix est claire, nette, et elle porte au moins jusqu’au continent. Il y a quelque chose de proche de la magie dans la voix de ce mec-là, quelque chose qui m’emporte toute entière en deux notes et trois mots, et ne me relâchera de toutes façons qu’une fois que lui, et lui seul l’aura décidé. Dans deux heures.

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Je chante. Ah ça, pour chanter, je chante. Et très vite, je me rends compte que je ne suis pas toute seule. Une vaste clameur musicale suit Bruno dans ses refrains, et, d’office, je sais que la soirée va être exceptionnelle, parce que le public l’aime de tout son coeur, en plus des nôtres, déjà totalement acquis à sa cause. On se sent tous portés par la même émotion, la simple joie d’être ici et de l’être avec lui. La sensation est puissante.

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Belle Journée passe si vite, mais j’en profite à l’abus, presque. Je ne lâche pas une seule seconde, et quand la chanson se termine, fidèle à mon poste, je ne suis plus que cris, sourires et applaudissements, alors que Bruno nous honore de son « bien l’bonsoir m’sieurs dames ! » et que, habituée, déjà, toute mon âme rejoint la joie évidente de la foule, qui devient de plus en compacte et de plus en plus massive. Et le voilà lancé sur l’Effet Papillon, titre pendant lequel les non-initiés se rendent vite compte que les pieds de Bruno ne touchent pas souvent terre, alors que notre chanteur saute joyeusement et s’amuse même à rapprocher son micro du sol pour nous faire partager le bruit de la scène qui n’avait pas forcément prévu d’avaler du zébulon si tard dans la nuit. Qu’importe, le sourire de notre en-chanteur irradie les premiers rangs, et, chaque fois qu’il regarde de notre côté, on lui répond exactement de la même façon. S’il avait ne fut-ce qu’un doute sur nos états de fans, le voilà rassuré.

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Derrière moi, équipée de son appareil photo et de son talent, Helene mitraille le concert avec une dextérité certaine. A peine le concert commencé, elle semble déjà ravie des résultats, non sans me glisser à l’oreille entre deux couplets « mais putain, il bouge tout le temps ! ». Oui. Oui, c’est bien là l’une des signatures de Bruno.

 

L’avant-scène du festival n’est pas laissée de côté, pour le coup. L’Effet Papillon est pratiquement exclusivement là, agrandissant de ce fait son espace de jeu de manière plus que significative. Là où, une fois encore, il m’épate, c’est que jamais il ne laisse un bout de public à part. Même au milieu, les deux côtés en prennent plein les yeux, et il donne l’impression de vouloir embrasser la totalité des premiers rangs…Typique. Généreux. Génial…

Bruno, quoi. J’aimerai vous dire que je suis surprise. Je ne suis plus !

Après…Après…Je suis toujours aussi incapable de restituer l’ordre des chansons. Vous espériez peut-être que cinq fois allaient suffire. Eeeeeeh ben non. Je vais avoir besoin d’au moins autant de dates pour parvenir à aboutir à quelque chose de correct.

MAIS j’arrive à remettre la main sur TOUS les titres. Ce qui est un progrès notable. Très notable.

Nous en sommes donc à la fin de l’Effet Papillon, et, très vite, non seulement je perçois l’énergie toute particulière de la date, mais en plus, je me rends compte que le petit chanteur français…Il n’a pas seulement mangé du lion, il a au moins avalé tout un zoo. Ce n’est pas sans me rappeler Orléans…

Mais en mieux.

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Naturellement, monsieur vient déjà taquiner la sympathique foule en prétendant attaquer déjà les rappels, et qu’ils vont bâcler le concert parce que Mardi, on est à Chateauroux, vous comprenez…

Et là, problème moral de taille. La foule entière hue sympathiquement, alors que Jess et moi, nous nous regardons en riant. On ne peut pas huer…On y sera aussi !!

Si je ne suis pas complètement paumée dans la set-list, déjà, on en est à Maritie Et Gilbert Carpentier. Que j’adore. Et Bruno, géniale boule d’énergie, donne l’impression que la scène n’est plus assez grande pour lui, et que, si, d’aventure, on venait à en rajouter un ou deux kilomètres, ce ne serait pas un problème. Et quand on en arrive au moment où tous les Michel sont nommés, complètement lâché, Bruno rajoute la moitié du botin mondain. Jess me colle un coup d’épaule et me lance « mais il est complètement lâché ou c’est moi ? ». Ce n’est pas toi. Il est complètement, totalement et définitivement lâché.

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Et à mon grand bonheur, cela ne va vraiment pas aller en s’améliorant. Pas du tout.

A la fin de la chanson, il nous balance que ce titre donne une idée précise de l’age du chanteur, qu’il n’a plus vingt ans, et que c’est pas vraiment la Reine Des Neiges. L’espace d’un instant, j’ai essayé de m’imaginer Bruno chantant « Libérée, Délivrée »…Si, si, je vous en prie, essayez, je vous jure que ça vaut le détour.

Vous m’excuserez, à partir de là, pour l’ordre aléatoire dans lesquels les souvenirs vont me revenir.

A partir du troisième ou quatrième titre, cependant, quelque chose d’étrange à commencé à se passer. Disons qu’il a du se rendre compte que le public le portait génialement, et qu’il était extrêmement receptif à toutes ses bêtises, et à partir de là…Il n’a plus vraiment donné dans la dentelle, il s’est tout permis, et je ne crois pas m’être jamais autant marrée sur un concert. Même Orléans. Même le Vauban. J’en pleurais de rire, et pas qu’un peu.

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Ah putain, et dire que des gens ne connaissent pas cette joie composite et fabuleuse que c’est que de voir Bénabar en concert…

Sur l’Agneau, qui me fait toujours sourire parce qu’il n’est vraiment pas grand derrière sa guitare, il se plante sur un bout de paroles, continue, et termine en concluant que de toutes façons, on s’en fout, c’était pas des bonnes paroles.

L’Agneau, quoi. C’en est d’autant plus drôle que, justement, les paroles sont extrêmement fines et particulièrement lucides, mais personne ne lui en a tenu rigueur, et son si joli sourire-oh, c’est bon, j’ai le droit de dire de temps en temps que son charme ne me laisse pas indifférente-témoigne très nettement de l’adhésion spectaculaire de la foule qui trouve que tourner l’incident en ridicule aussi spontanément efface tout à fait l’incident en soi.

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Je retire ce que j’ai dit lors de la review de Compiègne. Je le retire totalement, même. Parce que la meilleure version d’Infréquentable, c’était bien celle-ci. J’ai reconnu l’intro-non, je ne rêve pas-du premier coup, et j’ai alors anticipé pendant un petit instant l’arrivée de mon titre fétiche. Et cette version…Cette version…Elle était au delà de parfaite. Elle était absolument exceptionnelle, tant vocalement que sur sa présence, sa façon de se donner entièrement au public. J’ai pris le coup de boule de Zidane, des jours après, j’en ai encore des étoiles dans les yeux et les oreilles tant le moment fut magique. Je suis attachée à la chanson à la base, mais là, il y avait quelque chose qui sortait totalement de l’ordinaire. Marquée au fer rouge. Impossible à oublier. Et croyez-moi que ça chantait, ça chantait tout, ça chantait avec conviction, et pas que de mon côté. Les gens connaissaient le titre au moins aussi bien que moi, preuve absolue, irrefutable, dans vos gueules les Inrocks, que non seulement Bénabar est populaire, aimé, mais surtout, que ses chansons ont largemment depassé le cadre de la simple écoute pour devenir des marques du temps et de la culture, des choses qui vont rester et nous survivre tous.

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Naturellement, tous les classiques étaient beaux à s’en damner. Sa voix était parfaite, elle n’aurait pas pu être plus claire ni plus puissante, que ce soit sur Les Râteaux-la chanson engagée sur un sujet lourd-, sur Paris By Night-devenu Ile d’Yeu by night, je me marre à l’avance en l’imaginant galérer pour coller du Chateauroux by night mardi soir, tiens-, sur A Notre Santé-dont j’aime d’amour la douceur-, ou sur 4 Murs Et Un  Toit-avec public accroché aux refrains, et chanteur décidément convaincu que boutonner sa veste fait de lui un agent immobilier, bien vu. A La Campagne n’a pas démerité non plus, et j’ai adoré le voir prendre en pleine gueule la voix du public qui répondait à toutes ses demandes, portait les chansons, et, parfois, même, l’accompagnait directement sans même que rien ne nous force à le faire. Ce public était extraordinaire, et le voir réagir et sourire plus que d’accoutumée m’a fait immensément plaisir.

Si quelqu’un mérite bien de prendre des vagues d’amour aussi franches et puissantes, c’est bien lui…

Jusqu’ici, tout va bien, pas vrai ? Très bon concert, uh ?

Juste très bon concert…?

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Bienvenue dans la 136eme dimension. Où le concert est passé de très bon…A diabolique.

Commençons par Dis Lui Oui. Géniale, comme d’habitude, mais vous vous en doutiez un peu…Monsieur fait le malin avec son piano, ressort le désormais célèbre « qu’est-ce que j’ai pu niquer avec ça » en nous faisant la démonstration de la série d’accords jazzy…Et conclue, au vu du public familial et du nombre d’enfants dans la cour « vous expliquerez ça à vos gamins, ça vous fera le trajet retour ». Fou rire dans l’assistance, deux ou trois gamins derrière moi se retournent effectivement vers les parents et demandent déjà de quoi le monsieur sur scène parle. Eh ben, la navette de 1h va être belle à voir…

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Sur la fin de la chanson, ses supplications envers cette pauvre Mumu partent complètement en cacahuète, et même lui se rend compte que ça vire borderline pervers. D’ailleurs, quitte à faire pervers, autant accentuer le trait. Jess et moi n’en pouvons plus de nous marrer, alors qu’il en rajoute, et que la foule prolonge encore le fou rire, incapable de savoir qui des deux est le plus joueur. Lui. Nous. Lui. Nous…Nan, lui. Définitivement lui.

Je Suis De Celles, qui, d’habitude, me fait pleurer tout court…M’a cette fois fait pleurer de rire. Si, si, je vous jure.

La chanson partait très bien, gorgée d’émotions, terriblement émouvante, comme toujours, sauf qu’à un moment, il se loupe dans les notes. Mais bien comme il faut. Et il ne s’en cache même pas, souligne le plantage système, et balance un, très calme « en temps normal, je me serais enervé, mais là, même pas… » et, demandant à ce qu’on lui laisse deux secondes, quitte le piano, et dos à nous hurle un « meeeeerrrrdeeeuuh » en tapant du pied, avant de revenir à l’instrument ni vu ni connu. Je n’en pouvais plus, stupéfaite par son génie comique, et par sa façon hors normes de compenser ses propres failles par des traits d’humour absolument fabuleux.

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Ah ça, pour rire, je riais, à gorge déployée, heureuse comme jamais de le voir transformer un simple festival en moment sidérant de perfection et d’émotions, toutes plus belles les unes que les autres. Cinq fois après, je suis encore surprise, chamboulée, et je retombe une nouvelle fois amoureuse du chanteur.

Fort.

Très fort.

Mais je crois que le moment que j’ai préféré, et de loin, fut sur Les Deux Chiens. J’en rigole encore deux jours après…

Tous les deux, lui et son contrebassiste, établissent toujours une complicité qui me fait sourire, quand Bruno prétexte qu’il est son musicien préféré, que les autres sont jaloux…Mais cette fois, cette complicité s’est exprimée autrement. En fin de titre, alors qu’il jouait avec sa voix décidément en grande forme, il s’est fini sur un vibrato visiblement pas prévu, et ça l’a lancé sur un délire où il s’est mis à nous imiter Johnny. Et comme le public répondait, le chanteur continuait. Au final, une partie de ping pong entre lui, parti en orbite sur Saturne avec ses propres bêtises, et nous, qui répondions avec bonheur, ça aurait pu durer des heures…

Deux, des heures. Ca en a duré deux. Vingt chansons, magnifiées par l’île d’Yeu, et par ce public parfait qui a répondu en beauté à notre chanteur décidément parfait. J’avais beau être couverte de courbatures, avoir mal aux pieds à force d’être débout, pas une seconde, pas un instant je n’ai décroché, j’étais suspendue à ses lèvres sans discontinuer, perchée sur une autre planète…Une jolie planète.

Pardon pour les chansons que j’ai oubliées. Je n’ai pas assez de mémoire pour me souvenir de toutes les chansons, j’espère qu’elles ne m’en voudront pas, je vous aime, les filles, mais votre auteur, et votre interprète est un tel artiste, et il est tellement fait pour la scène que je ne suis pas dotée d’un disque dur cérébral suffisament grand pour vous rendre hommage à toutes. Mais je vous aime. D’amour.

Retour de rappel, déjà. La fin se dessine à l’horizon, et avec elle, ma parfaite, génialissime, extraordinaire version du déjà parfait, génialissme, extraordinaire Dîner. Cette version est absolument…Si je dis « parfaite », je crois que je me répète. Mais bordel, c’est vrai, surtout ! J’aimais cette chanson avant, je l’adore maintenant. L’île d’Yeu en tremblait de joie.

Moi avec…

Fin de concert, hélas. Bonne Année. Qui aura, et ce, pour toujours, cette petite amertume de la fin du bonheur, de la fin du concert, des lumières qui vont bientôt se rallumer pour jeter un point final à un moment magique. J’en avais les larmes aux yeux…Comme souvent. Comme tout le temps. Chaque instant est précieux, jusqu’au bout, jusqu’a ses remerciements finaux, jusqu’à ses regards de premiers rangs touchés, émus, porté par nous. Jusqu’à ce qu’il ne quitte la scène, et ne me manque déjà.

Oh, pas pour longtemps…Cette fois, le prochain est dans quarante-huit heures.

Demain, à l’heure où j’écris…

Quand nous avons retrouvé la route, dans la nuit noire, et la navette retour, j’avais beau n’être plus qu’une gigantesque courbature vivante couverte de coups de soleils, j’étais la fan la plus heureuse, la plus ravie, la plus pleine de gratitude que la terre portait. Je planais, presque littéralement, ce qui était drôle, étant donné que nous étions sur le bateau…

Le trajet retour fut bien moins compliqué que l’aller. Moins nauséeux, surtout, ce qui constituait une amélioration non négligeable. En retrouvant le plancher des vaches à St Gilles Croix De Vie, je n’étais toujours pas redescendue de mon nuage.

 

Mais maintenant qu’on en parle, le nuage…J’y suis toujours.

Et quelque chose me dit que ce que je fais demain ne va pas m’aider à en tomber de si tôt.

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Bruno, tu n’es pas un juste un chanteur. Tu es un chanteur à rêves. 

 

 

 

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